Un juge sévèrement blâmé par le Conseil de la magistrature à la suite de notre enquête
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Un ancien juge de la cour municipale de Longueuil est sévèrement blâmé par le Conseil de la magistrature du Québec pour avoir surfacturé volontairement des heures de travail et avoir acquitté en «42 secondes» une amie qui avait eu une contravention routière.
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S’il avait encore été en poste, l’ex-juge Jean Herbert, qui a pris sa retraite au début de 2019, aurait été destitué, indique un comité d’enquête du Conseil.
Rendue récemment, la décision du comité emploie des mots durs pour qualifier les gestes qu’on lui reproche.
Ainsi, le magistrat a :
- Fait preuve d’un comportement «impardonnable» en posant des «gestes volontaires et répétés» pour surfacturer ses heures de travail ;
- Démontré des agissements qui s’«[apparentent] à de la fraude» en demandant à une procureure d’étirer sans raison l’audition d’une cause ;
- «Perverti» l’impartialité et l’objectivité de son rôle en acquittant une amie pour lui éviter une amende.
Sans suite
Ces constats resteront toutefois sans suite.
«Dans les circonstances, le comité [d’enquête] doit dénoncer la gravité des gestes posés, mais, vu la retraite de M. Herbert, se résout à recommander [...] de fermer ces dossiers», écrit-on dans la décision.
Rappelons que l’enquête du Conseil de la magistrature tire essentiellement son origine des révélations en 2019 de notre Bureau d’enquête sur les agissements du juge Herbert.
La ministre de la Justice de l’époque, Sonia Lebel, s’était saisie de l’affaire pour porter l’une des trois plaintes visant l’ex-magistrat.
L’UPAC
L’Unité permanente anticorruption (UPAC) s’est également intéressée au cas du magistrat, puisqu’elle avait procédé en juin 2019 à une perquisition à la cour municipale de Longueuil pour obtenir des documents concernant la surfacturation des heures de travail.
Joint lundi, le porte-parole de l’UPAC, Mathieu Galarneau, a refusé d’indiquer où en était rendue cette enquête.
Rappelons que le juge Herbert n’est pas le seul magistrat à être la cible d’une enquête disciplinaire pour des manquements prononcés.
- Écoutez l'entrevue de Benoit Dutrizac avec Lino Zambito sur QUB radio :
Propos outranciers
Le juge Gérard Dugré de la Cour supérieure du Québec pourrait perdre son poste après avoir proféré des commentaires outranciers à de multiples reprises dans des causes qu’il présidait et avoir fait preuve de retards à répétition pour rendre ses jugements.
Une décision finale du Conseil canadien de la magistrature devrait confirmer sous peu sa destitution.
La juge Denise Descôteaux, de la Cour du Québec à Val-d’Or, quant à elle, a été l’objet de deux réprimandes de la part du Conseil de la magistrature du Québec et pourrait écoper bientôt de deux autres en raison de ses comportements en cour.
3 MANQUEMENTS ACCABLANTS
► Le juge Herbert demande à une procureure de retarder volontairement le déroulement d’une cause pour qu’il puisse surfacturer des heures.
«La conduite de M. Herbert est manifestement malhonnête [...] Il utilise son statut de juge pour influencer la procureure du poursuivant à faire une fausse demande de suspension», écrit le comité d’enquête du Conseil de la magistrature dans sa décision.
► Il a surévalué ses heures de travail à 160 reprises entre 2016 et 2019, ce qui lui a permis de surfacturer ses heures pour un montant de près de 40 000 $.
«Poser des gestes volontaires et répétés afin de tirer profit du système de facturation des juges municipaux à la séance est impardonnable [...] Jamais un membre raisonnable et informé [du public] ne pourrait juger acceptables ou justifiables de tels gestes», écrit-on dans la décision.
► Le magistrat favorise une amie en l’acquittant en 42 secondes d’une contravention pour avoir omis un arrêt obligatoire, en plus de lui avoir prodigué des conseils juridiques avant sa comparution.
«Il est clair que M. Herbert n’aurait pas dû entendre la cause, car il ne pouvait agir avec l’impartialité et l’objectivité [...] Un tel comportement est susceptible de semer le doute chez les citoyens et saper la confiance du public envers les institutions judiciaires», écrit-on.