Speaker de la Chambre: vol au-dessus d’un nid de coucous
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Mardi, la politique américaine nous a une fois de plus offert un moment historique. Que Donald Trump soit le candidat républicain ou pas en 2024, nous avons constaté que les legs de son implication hanteront le Parti républicain pour un moment encore.
Kevin McCarthy et la légende de Faust
Peut-être vous souvenez-vous du conte du savant Faust qui, pour obtenir savoir et jouissance, vendit son âme au diable. C’est un peu ce qu’a tenté Kevin McCarthy au cours des dernières semaines. Mal lui en prit, de son âme, on n’a point voulu.
Le représentant républicain de la Californie caressait depuis longtemps le rêve de devenir le speaker de la Chambre. Après un premier échec il y a huit ans, il croyait toucher au but.
Un groupuscule de ses collègues s'est interposé entre son rêve et lui. Après leur avoir offert moult compromis, dont la possibilité de le démettre de ses fonctions, McCarthy savait dès le début de la séance d’hier qu’il ne bénéficierait pas du nombre d’appuis requis (218).
L’humiliation est totale puisqu’il a répondu à toutes les demandes des mutins, presque tous fidèles partisans de Donald Trump. Celui qui s’était empressé de se rendre à Mar-a-Lago après l’insurrection de janvier 2021 pour baiser la bague du parrain ne peut se pervertir plus.
Kevin McCarthy se retrouve mercredi matin au cœur d’une situation historique, du jamais vu depuis 1923. Généralement, on ne décide pas de l’identité du speaker en Chambre, les négociations se déroulent avant et les tractations ne sont que peu ou pas exposées publiquement.
En 1923, on a eu besoin de neuf tours pour identifier le meneur. Mardi, on a ajourné les travaux après trois tours, mais personne n’est en mesure de prédire la suite.
Payer le prix des années Trump
Non seulement les principaux récalcitrants ont en commun leur appui au 45e président, tout comme lui ils prétendent être entrés en politique pour nettoyer Washington et faire de la politique autrement.
L’intention est noble et la classe politique américaine a effectivement besoin d’être secouée, mais les opposants de McCarthy ont aussi en commun d’être soit incompétents, soit inexpérimentés, soit d’être particulièrement malhonnêtes ou, cerise sur le sundae, peu scrupuleux au plan éthique.
Il n’est guère surprenant de les voir miner le leadership de leur propre parti et de nuire à l’image de leur formation politique. Le compromis n’est pas dans leur nature.
Les républicains sont sortis amochés des élections de mi-mandat et ils espéraient qu’en prenant au moins le contrôle de la Chambre, ils parviendraient à convaincre les électeurs de leur confier aussi la présidence et le Sénat en 2024.
Les démocrates ne peuvent que se réjouir du piètre spectacle offert mardi par leurs grands rivaux. Difficile de vendre l’idée qu’on peut mener le pays quand on ne parvient même pas à s’entendre sur l’identité du speaker. Le Parti républicain est à la croisée des chemins.