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Des nouvelles de Cuba: religion et santeria

Des nouvelles de Cuba: religion et santeria
Jacques Lanctôt

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Même si le gouvernement cubain aurait de bonnes raisons de garder rancune au clergé – on pense, entre autres, à l’Opération Peter Pan, au début des années 1960, où le haut clergé cubain a favorisé le départ de milliers d’enfants vers les États-Unis, sans leurs parents, sous le faux prétexte que le nouveau gouvernement socialiste allait envoyer les enfants se faire «endoctriner» en Union soviétique –, il existe bel et bien la liberté de religion dans l’île des Caraïbes, quoi qu’en dise l’actuel président des États-Unis. 

Une de ces religions, fort populaire, est la religion yoruba, originaire d’Afrique, que les Cubains ont adaptée à leurs conditions et mieux connue sous le nom de santeria. On ne s’entend pas sur les origines de la santeria à Cuba. Certains disent que les esclaves faisaient semblant de vénérer les saints catholiques de leurs maîtres, mais qu’en fait il s’agissait d’orishas, leurs propres saints. D’autres disent que c’est l’Église catholique qui a imposé aux esclaves de vénérer leurs saints en les adaptant aux orishas des esclaves. Mais, avant tout, il faut savoir que ce n’est pas une religion de haine, d’exclusion et de domination d’un sexe sur un autre.

Quoi qu’il en soit, la santeria est très présente ici et est pratiquée aussi bien par les Blancs que par les Noirs. Car, comme on le dit souvent, la société cubaine est une société métissée, un ajiaco criollo, une sorte de ragoût ou fricassée où l’on trouve de tout, bien mélangé dans une soupière ouverte, sans couvercle (c’est une métaphore!).

Chaque début d’année, les grands prêtres de la religion yoruba se réunissent pour élaborer la «Lettre de l’année», selon un rituel au cours duquel certains animaux (coq, pigeon, etc.) seront sacrifiés. Puis ils font connaître à leurs fidèles ce qu’il en sera de la nouvelle année, aussi bien à Cuba qu’ailleurs dans le monde. Ces prédictions sont le fruit de réflexions communes émanant d’un grand conseil présidé par un Ifa, un Sage. 

Ainsi, apprend-on que l’année 2023 sera placée sous la protection d’Obatalá, secondée par Oshún. Obatalá est une des figures les plus importantes de cette religion et est représentée, dans la religion catholique, par la Vierge de la Merced (une sorte de Vierge de la Miséricorde), la patronne de la ville de Barcelone. Elle est la créatrice de la Terre, mère de tous les orishas. Elle contrôle notre tête, nos pensées et nos rêves. Tandis qu’Oshún est représentée par la Virgen de la Caridad del Cobre, la patronne de Cuba. C’est la reine des eaux douces (fleuves, lacs, sources) et elle personnifie l’amour et la fertilité.

La déclaration officielle énonce toute une série de recommandations et de comportements à suivre ou à éviter. On y dit que «si le bol est fissuré, jamais il ne se remplira», ou que «sur la terre des morts, je suis le contremaître», ou que «la mort doit respecter les vivants» ou que «celui qui aide beaucoup son prochain recevra beaucoup en retour». On prévoit une augmentation des maux de gorge et de la colonne vertébrale et que le stress causera bien des maux de tête. On se dit préoccupé par le vieillissement de la population, la baisse du taux de natalité et le départ du pays de nombreux jeunes, tout en insistant sur la nécessité d’assurer une bonne éducation des enfants qui forment la relève. 

Les pratiquants sont invités à faire un ebbó (une offrande) au saint auquel ils sont consacrés, comme un poussin, un bracelet coloré, de la terre provenant d’un trou, etc. Et on recommande de faire des paraldos (cérémonies rituelles, avec chants et sacrifices) pour chasser les éléments perturbateurs et honorer les ancêtres.

Il faut savoir qu’une personne qui veut rejoindre la religion yoruba doit d’abord subir un parrainage de quelques jours avec un parrain de son choix, qui lui prodiguera conseils et lui indiquera à quel saint se vouer, selon le caractère de l’aspirant/e: Obatalá (Vierge de la Miséricorde), Oshún (Vierge du Cuivre), Yemayá (Vierge noire de Regla), Chango (Sainte Barbe), Elegguá (Saint Antoine de Padoue), Oggun (Saint Pierre ou Saint Jean Baptiste), Oyá (Sainte Thérèse d’Avila ou La Vierge de la chandeleur), Babalu Aye (Saint Lazare), chacun de ces saints ayant ses propres attributs. À la suite de quoi cette personne devra porter en tout temps un petit bracelet aux couleurs du santo (vous l’avez sûrement déjà remarqué si vous venez fréquemment à Cuba). C’est effectivement un signe religieux apparent, mais ici, aucun problème et surtout, il n’est associé à aucune soumission ou domination d’une personne sur une autre. La société cubaine est vraiment cool. Et n’oubliez pas, lorsque vous ouvrez une nouvelle bouteille de rhum, de jeter la première goutte sur le sol, comme le font tous les Cubains, pour saluer los santos.

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