La démocratie survivra-t-elle à Netanyahu?
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Israël est en émoi. Plus de 100 000 personnes ont manifesté hier dans les rues de Tel-Aviv contre la réforme judiciaire du premier ministre Benjamin Netanyahu considérée comme une menace à la démocratie israélienne. Elle permettrait à sa coalition d’extrême droite d'annuler les décisions de la Cour suprême à la majorité simple au Parlement.
Dans une défense sans précédent du système judiciaire, presque tous les procureurs d’État qui ont servi au cours du dernier demi-siècle ont, dans une lettre ouverte, averti que ces réformes «détruiraient» l'indépendance judiciaire. L'ambassadeur d'Israël au Canada annonce qu'il va démissionner, son intégrité personnelle et professionnelle l'obligeant à quitter son poste.
L’occasion fait le larron
La Cour suprême d’Israël vient de juger que la double nomination par Netanyahu de Aryeh Deri comme ministre de l'Intérieur et de la Santé et était «extrêmement déraisonnable» considérant ses crimes financiers passés. En 2000, Deri a été condamné à trois ans de prison pour corruption, escroquerie et abus de confiance lorsqu'il était ministre de l'Intérieur dans les années 1990. Il a purgé 22 mois de sa peine. Netanyahu a lui-même été en 2019 inculpé pour abus de confiance, fraude et corruption. Le premier chef de gouvernement à l’être durant son mandat dans l’histoire d’Israël.
Se conformant à la décision de la Haute Cour, Netanyahu a, ce matin, limogé Deri de son Cabinet, lui disant qu'il le retirait de son poste avec «le cœur lourd et une grande tristesse». Le chef du parti Shas conservera cependant son titre de vice-premier ministre de la coalition composée de partis ultranationalistes, ultra-orthodoxes et racistes. Le Shas est la troisième plus importante formation du gouvernement.
Yisrael Frey, un journaliste israélien pourtant ultra-orthodoxe, est pessimiste quant à la trajectoire de la politique israélienne actuelle. Il craint les mesures que la coalition est disposée à prendre pour éviter la prison à Netanyahu. Il déclare au site Middle East Eye: « Ce ne sont pas des temps ordinaires; on parle d'un gouvernement raciste qui envisage de démolir le système judiciaire».
Les accords d’Abraham en danger
Les évènements en Israël depuis la prise de pouvoir par l’extrême droite ont des répercussions négatives à l’étranger pour l’état juif: la plupart des membres du gouvernement israélien sont opposés à la création de l'État palestinien.
Les accords d'Abraham parrainés par les États-Unis, qui ont établi des liens diplomatiques entre Israël, les Émirats arabes unis, Bahreïn, le Maroc et le Soudan, sont menacés. Les Palestiniens les ont condamnés comme un «coup de poignard dans le dos.»
S'exprimant au Forum économique mondial de Davos, le ministre saoudien des Affaires étrangères a déclaré que Riyad ne normalisera pas ses relations avec Israël sans un État palestinien.
Washington est aussi préoccupé par la situation en Israël. Le conseiller à la sécurité nationale de Biden, Jake Sullivan, a rencontré Netanyahu à Jérusalem pour soulever avec lui la question de la refonte du système judiciaire du pays qui pourrait nuire aux relations des États-Unis avec Israël.