Doit-on repousser l’âge d’admissibilité au Régime des rentes du Québec?
Le gouvernement Legault devra trancher au terme d’une vaste consultation
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Faudra-t-il bientôt attendre d’avoir 62 ou 65 ans avant de pouvoir commencer à retirer ses prestations de retraite du Régime des rentes du Québec (RRQ)? Le gouvernement Legault devra trancher la question après une importante consultation publique qui s’ouvre mercredi à l’Assemblée nationale.
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En France, on assiste, depuis plusieurs semaines, à des manifestations monstres en réaction à la réforme que veut imposer le gouvernement, en faisant passer l’âge de la retraite de 62 à 64 ans, par crainte de finir par manquer de fonds.
Au Québec, la situation est différente: «les entrées de fonds au RRQ seront suffisantes pour verser leurs rentes aux bénéficiaires durant les 50 prochaines années», indique un document de consultation préparé par Retraites Québec.
Mais ici comme ailleurs, les changements démographiques et la pénurie de main-d’œuvre imposent des ajustements. Et, comme en France, le gouvernement Legault s’attend à de la résistance syndicale.
Deux scénarios
À compter de mercredi, de nombreux groupes intéressés par la question, dont des experts et les syndicats, défileront en commission parlementaire afin de se prononcer sur l’importante réforme que propose le RRQ pour adapter son régime «aux défis du 21e siècle».
Six ans après la dernière consultation ayant mené à une bonification de 25 % à 44 % du taux de remplacement du revenu à la retraite à 65 ans, le RRQ propose cette fois-ci deux scénarios :
- rehausser de 60 ans à 62 ans l’âge minimal d’admissibilité au RRQ et de 70 à 72 ans l’âge maximal, d’ici 2030 ;
- rehausser de 60 ans à 65 ans l’âge minimal d’admissibilité et de 70 à 75 ans l’âge maximal d’ici 2045.
«On ne parle pas ici de l’âge de la retraite», a expliqué l’actuaire en chef de Retraite Québec, Jean-François Therrien, en entrevue avec notre Bureau parlementaire.
- Écoutez la chronique de Gilles Proulx, chroniqueur au Journal de Montréal et Journal de Québec, entre autres au sujet du régime de rentes, au micro de Richard Martineau sur QUB radio :
Attendre jusqu’à 65 ans
Dans les deux scénarios, l’âge à partir duquel les Québécois peuvent toucher 100 % de leur rente, sans être pénalisés, serait toujours fixé à 65 ans. Mais l’âge minimal pour commencer à recevoir des prestations du RRQ moyennant une réduction serait repoussé de deux ou cinq ans.
À l’heure actuelle, les Québécois peuvent commencer à toucher leur rente dès l’âge de 60 ans, mais elle est réduite de 36 %, à vie. Ceux qui attendent jusqu’à 65 ans ont droit à 100 % de leur rente, alors que ceux qui reportent leur retraite jusqu’à 70 ans ont droit à une bonification.
«La rente RRQ avec sa pleine indexation (à 65 ans), c’est un outil parfait pour se protéger à la retraite et augmenter sa sécurité financière», fait valoir M. Therrien.
Autrement dit, Retraite Québec souhaite que les Québécois soient moins nombreux à se pénaliser en prenant leur retraite avant 65 ans.
CONSULTATION SUR LA RÉFORME DU RRQ
Un aperçu des groupes consultés
Mercredi 8 février
MATIN
- Association québécoise des retraités(e)s des secteurs public et parapublic
- Alban D’Amours, président du Comité d’experts sur l’avenir du système de retraite québécois et Luc Godbout, titulaire Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques de l’Université de Sherbrooke
APRÈS-MIDI
- Confédération des syndicats nationaux (CSN)
- Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)
- Réseau FADOQ
- Force Jeunesse
Jeudi 9 février
- Conseil du statut de la femme
- Centrale des syndicats du Québec
- Conseil du patronat du Québec
Mardi 14 février
- Corporation des thanatologues du Québec
- Institut canadien des actuaires
Source: Assemblée nationale
Le PQ veut une autre solution
Craignant que ceux qui ont travaillé dur toute leur vie subissent un préjudice, le Parti Québécois s’oppose à ce que l’âge minimal pour avoir droit aux prestations de retraite soit rehaussé.
«On va demander au gouvernement de s’engager à ne pas hausser l’âge minimal d’admissibilité au RRQ», a fait savoir le chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon à notre Bureau parlementaire, alors que débutent, mercredi, les consultations sur la réforme proposée par Retraite Québec.
Officiellement, le gouvernement Legault n’a pas encore tranché à savoir s’il ira de l’avant avec l’une ou l’autre des solutions proposées par Retraite Québec, soit de repousser de deux ou de cinq ans, l’âge à partir duquel les Québécois peuvent commencer à toucher leur rente du RRQ.
Pour le Parti Québécois, le défaut d’une telle approche, «c’est qu’elle est mur à mur», considère M. St-Pierre Plamondon.
«Il faut tenir compte de la situation d’un paquet de catégories de travailleurs dont la capacité à continuer à travailler varie en fonction du type d’emploi. Il y a des emplois qui sont très exigeants, très durs, notamment physiquement, ce qui peut amener un travailleur à faire le choix, à 60 ans, d’avoir recours au RRQ», a souligné le député de Camille-Laurin.
Inquiet pour les travailleurs qui ont des enjeux de santé physique ou psychologique, le chef péquiste considère qu’il n’appartient pas au RRQ de «déterminer la situation particulière de chaque individu».
«Donc nous, on pense que c’est plus respectueux de laisser à chaque travailleur le choix (de toucher sa rente plus tôt ou tard)», a-t-il exposé.
Viabilité
En revanche, le Parti Québécois propose de mettre de l’avant d’autres solutions pour assurer la viabilité du régime et encourager les aînés à participer au marché du travail.
Pour renflouer les coffres, le PQ propose par exemple de bonifier le maximum annuel des revenus de travail admissibles, appelé aussi maximum des gains admissibles au RRQ, en le faisant passer de 66 000 $ à 75 000 $.
«Ça permettrait d’équilibrer le régime sans heurter des gens qui sont en situation de précarité, croit le chef péquiste. On demande au gouvernement d’explorer de solutions comme celle-là, étant donné que les augmentations de ce plafond-là sont vraiment en deçà de l’inflation au cours des dernières années.»