Des enseignants au collégial ne maîtrisent pas suffisamment le français, selon un rapport
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Non seulement les étudiants arrivent au collégial en présentant de graves lacunes en français, mais les établissements d’enseignement sont contraints par la pénurie de main-d’œuvre d'embaucher des professeurs qui ne satisfont pas à leurs attentes en matière de français écrit.
C’est un des constats que dresse le Rapport sur la maîtrise du français au collégial, rendu public vendredi même si le gouvernement l’a en sa possession depuis plus d’un an.
Les auteures du rapport notent que la rareté de la main-d’œuvre place les établissements devant des «choix difficiles au regard des compétences langagières du personnel recruté».
«Dans les cas où il est ardu de pourvoir une charge d’enseignement, il arrive qu’ils retiennent des candidatures qui ne satisfont pas pleinement à leurs attentes en matière de français écrit», remarquent-elles.
En conséquence, elles recommandent que chaque collège «mette en place des moyens pour évaluer le niveau de maîtrise du français du nouveau personnel enseignant et qu’il détermine un mécanisme de suivi quand l’embauche est assortie de conditions relatives à la maîtrise du français».
La ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry, estime que les enseignants doivent bien connaître le français afin d’assurer la maîtrise de la langue par les étudiants. «On est déjà en action pour évaluer avec le réseau collégial comment on pourrait implanter des activités de perfectionnement en français pour les enseignants», a-t-elle assuré.
Et les étudiants...
Le portrait n’est hélas pas plus rose en ce qui concerne les étudiants, dont la réussite scolaire au collégial est mise en péril par l’insuffisance de leurs compétences de base en français à la sortie du secondaire.
Si les connaissances grammaticales sont la bête noire des étudiants, les auteures du rapport notent des carences également en ce qui concerne l’orthographe, la syntaxe et le vocabulaire.
Elles recommandent donc de poursuivre l’enseignement de la grammaire au cégep, au grand dam des profs.
«Cette recommandation est symptomatique de quelque chose qui ne fonctionne pas en amont, au primaire et au secondaire», a lancé la présidente de la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec, Caroline Quesnel.
«C’est comme si on disait aux profs de mathématique d’enseigner les tables de multiplications au cégep», a-t-elle ironisé en insistant sur le fait que l’enseignement supérieur doit s’appuyer sur un «certain niveau de connaissance de base».
Quand on lui fait remarquer que certains profs ne maîtrisent pas suffisamment leur langue, Mme Quesnel opine : «Qu’il y ait une maîtrise variable, cela me semble évident, a-t-elle dit. C’est le cas au secondaire aussi d’ailleurs!»
«L’écriture numérique»
Pour remédier à la situation, les auteures du rapport suggèrent également que «l’écriture numérique devienne la pratique courante au collégial» dans l’ensemble des disciplines, une pratique devenue nécessaire, selon elles, par l’omniprésence du numérique dans nos vies.
À leur avis, les outils comme Antidote présentent un intérêt pédagogique et devraient ainsi être intégrés à l’enseignement collégial. Plutôt que des béquilles, ces outils permettraient aux étudiants de mieux écrire, du moins «dans un contexte numérique», ont-elles noté.
Cela ouvrirait éventuellement la porte à ce que ces outils soient permis lors des épreuves uniformes de français, dont les exigences devraient alors être «rehaussées».
De son côté, la ministre Déry a reçu ces recommandations avec un brin de scepticisme. «Avant d’utiliser ces outils, il doit y avoir une compréhension suffisante des connaissances de base sur le fonctionnement de la langue, ce qui n’est pas le cas pour certains étudiants actuellement», a-t-elle expliqué.
Difficile d’obtenir un DEC
Les étudiants ayant obtenu moins de 75 % à l’épreuve de français de secondaire 5 représentent 40% des nouveaux admis au collégial depuis 2010.
Environ 50 % de ces étudiants n’obtiendront pas leur diplôme d’études collégiales.
Ceux qui obtiennent une meilleure note au secondaire ont un taux de diplomation au Cégep oscillant autour de 84 %