L’industrie de l’audiovisuel, grande gagnante de cette «semaine» budgétaire
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En une semaine, notre industrie de l’audiovisuel a fait des gains importants, mais suffiront-ils à protéger nos acquis ?
Les sommes supplémentaires que les budgets d’Ottawa et de Québec viennent d’annoncer sont plus que bienvenues. Sans nos industries culturelles, en particulier sans la télévision et sans le cinéma, la survie du français au Québec et encore plus au Canada serait bien aléatoire. Il semble que nos deux gouvernements l’aient compris. Ce n’est pas trop tôt.
La semaine dernière, suite à la présentation du budget provincial, Mathieu Lacombe, le ministre de la Culture et des Communications a annoncé que 649,4 millions sur cinq ans seront consacrés exclusivement à la promotion du français et de la culture. Mardi, c’était au tour de Pablo Rodriguez, ministre du Patrimoine, de faire adopter par son gouvernement des mesures budgétaires qui favoriseront le rayonnement du français.
LA PART DU LION
L’industrie de l’audiovisuel est la grande gagnante de cette « semaine » budgétaire. Le ministre Lacombe a porté le budget de la SODEC à 200 millions. Même si l’organisme supporte aussi les métiers d’art, l’édition, la musique et les spectacles, c’est l’audiovisuel qui touche la part du lion. Le budget de Télé-Québec, qui n’avait pas bougé depuis un quart de siècle, sera désormais de 101 millions $ par an pour les prochains cinq ans. C’est un strict minimum.
Au fédéral, une somme supplémentaire de 40 millions sur deux ans sera accordée au Fonds des médias du Canada. La plus grande partie de cette somme – jusqu’à 37 millions, semble-t-il – serait consacrée à la production française.
Depuis que Madame Hélène Messier en est la PDG, l’Association québécoise de la production médiatique (AQPM) n’a pas cessé de faire campagne pour que les sommes dévolues au Fonds des médias soient divisées 60/40 entre anglophones et francophones. Traditionnellement, le partage fut toujours de 2/3-1/3 même si les francophones comptent seulement pour le quart de la population canadienne.
L’AQPM n’était pas peu fière d’avoir réussi à faire inscrire ce nouveau partage 60/40 dans le programme électoral du parti libéral. La promesse libérale a soulevé un tollé au Canada anglais. D’anciens ministres du Patrimoine comme James Moore (conservateur) et Sheila Copps (libérale) se sont prononcés contre. Quant à Raynolds Mastin, PDG de la CMPA (l’association des producteurs de langue anglaise), il a laissé entendre qu’un nouveau pourcentage serait acceptable à la seule condition que « beaucoup, beaucoup plus d’argent » soit accordé au Fonds des médias, sans toutefois en préciser le montant.
LES GÉANTS ENNEMIS
Par prudence – et sans doute aussi par sagesse politique – la somme additionnelle accordée au Fonds des médias dans le dernier budget n’aurait aucun rapport avec un changement des pourcentages traditionnels 2/3-1/3. Le budget ne prévoit aucune somme supplémentaire pour Téléfilm. De son côté, l’Office national du Film touchera 10 millions de plus sur deux ans. Une façon de reconnaître l’intérêt que porte l’ONF à la culture autochtone.
Un jour, la contribution des géants du numérique à notre système de radiodiffusion (qu’on estime à quelque 800 millions par an) pourra presque à elle seule assurer la pérennité de notre télévision et de notre cinéma. Pour l’instant, leurs pires ennemis sont précisément ces géants dont les moyens sont quasi illimités. Leur répertoire infini est pourtant si mince en productions de langue française que l’existence de ces géants ne fait que fragiliser un peu plus chaque jour notre culture.