Biden devrait-il gracier Trump?
Il y a déjà plusieurs mois que des observateurs ont soulevé la question, mais l’inculpation du 45e président la semaine dernière a relancé le débat. Doit-on laisser la justice suivre son cours, en risquant au passage de déchirer la nation, ou devrait-on plutôt envisager un pardon?
Les partisans du pardon
Les férus d’histoire se rappellent probablement que Gerald Ford avait opté pour un pardon présidentiel le 8 septembre 1974. Évoquant une véritable tragédie, il doutait que son prédécesseur puisse jouir de la présomption d’innocence et d’un procès juste.
Plutôt que de laisser ses concitoyens s’entre-déchirer pendant un processus long et douloureux, il jugeait plus sage de regarder vers l’avenir en assurant la tranquillité à son pays (sa déclaration est ici).
La décision de Ford avait été dénoncée vivement par des journalistes, des politiciens et des citoyens, mais avec le recul, la majorité des opposants considèrent maintenant que le pardon accordé à Nixon constituait la meilleure option.
En 2023, ceux et celles qui considèrent un pardon pour Trump ne sont pas forcément des partisans du 45e président. Un peu à l’image de Ford, ils et elles souhaitent éviter le pire. Leurs craintes sont amplifiées par la nature de Trump. Ce dernier semble aimer le chaos, il y est dans son élément.
Si on imagine plusieurs accusations après celles de New York, les partisans du pardon envisagent de très longues procédures judiciaires pendant lesquelles le cirque des 5-6 dernières années se poursuivrait. Ultimement, même un verdict de culpabilité ne changerait rien aux perceptions et la division demeurerait tout aussi profonde.
En opposition au pardon
Si j’ai bien lu tout ce qui se rattache à la décision de Ford et que j’ai bien noté qu’avec un peu de perspective ses opposants de 1974 ont changé d’opinion, je me rallie malgré tout à ceux et celles qui s’opposent à un geste d’ouverture de Biden.
Je pourrais résumer simplement l’argumentaire en affirmant que Trump n’est pas Nixon et que Biden n’est pas Ford. S’il est vrai que ce qu’on reprochait à Nixon était grave, en 2023 ce sont les fondements du système qu’il faut préserver. Ce que Biden lui-même appelait l’âme du pays.
Gracier Trump alors que pour une rare fois dans sa vie il est confronté aux retombées de ses propos et de ses magouilles m’apparaît contre-productif. Alors que les citoyens ont souvent l’impression que les lois ne s’appliquent pas aux riches et aux nantis, on enverrait un bien mauvais signal.
Plus important encore, de nombreux fanatiques, des représentants de l’extrême droite et des fascistes ont trouvé dans le 45e président un meneur providentiel. Eux qui se cachaient encore avant 2016, œuvrent maintenant en plein jour et noyautent le mouvement conservateur. Vous croyez qu’un pardon calmerait leurs ardeurs?
Si vous êtes de ceux et celles qui croient que les dernières années ont constitué un cauchemar pour les États-Unis, un pardon n’y changerait rien, il le prolongerait.