L’identité narrative: mon récit intérieur
La façon dont on se raconte notre vie joue un rôle beaucoup plus important qu’on pourrait le penser: non seulement dans notre façon de nous percevoir, de comprendre notre trajectoire de vie, mais aussi, de construire notre identité.
Si nous possédons tous des traits, des ressemblances, voire des atomes crochus avec d’autres personnes, nous sommes toutes et tous uniques.
Et qu’est-ce qui façonne l’unicité de tout un chacun? D’abord, notre constitution biologique, à laquelle viendra s’ajouter notre personnalité, soit nos traits de caractère qui sont relativement stables à travers le temps et qui influencent nos pensées, nos comportements, nos motivations.
D’autres éléments tels que les buts, les valeurs et les croyances contribuent aussi à nous démarquer des autres.
À cela vient également s’ajouter un autre élément fondamental à notre unicité: notre identité narrative.
En toile de fond, un récit intérieur
Notre parcours de vie tel qu’on le conçoit n’est en effet pas qu’une série de faits et d’événements qui se succèdent, mais bien une histoire à laquelle on a donné un sens, à laquelle on a greffé des perceptions, des émotions, un récit qu’on se raconte constamment à l’intérieur de nous, qui nous construit.
Face à une épreuve, est-ce qu’on s’est donné le bon rôle... ou pas? Ce moment difficile a-t-il eu sur moi un impact positif ou négatif ? Est-ce que je l’ai subi, ou ai-je pu agir face à celui-ci? Quel sens ai-je pu lui attribuer?
D’une personne à l’autre, plusieurs récits intérieurs peuvent ainsi découler d’un seul et même événement. Par exemple, il m’est souvent arrivé de partager un repas avec des frères et des sœurs qui me racontaient leur enfance et qui me parlaient de leurs parents. Ayant le même père et la même mère, ces frères et sœurs partageaient pourtant une impression, une perception et une interprétation très distinctes de leurs parents. Le récit intérieur que chacun s’était forgé face à des événements pourtant identiques avait changé la donne.
Pour l’un, le parent plus sévère avait été vu comme étant austère, autoritaire, coercitif. Pour l’autre, ce même parent avait plutôt été vu comme étant bienveillant en lui fournissant un certain cadre, une certaine discipline, et avait ainsi agi dans son meilleur intérêt.
Revisiter son histoire
Un ami me racontait que durant son enfance, le jour de son anniversaire, son oncle avait mis fin à ses jours. Pendant de nombreuses années, cet ami en a énormément voulu à cet oncle d’avoir choisi «de façon délibérée» cette date pour commettre l’irréparable: il croyait en effet dur comme fer que cet oncle avait volontairement choisi ce moment pour bousiller son anniversaire.
Plus tard dans sa vie, mon ami a pu mieux comprendre la dépression, à quel point la souffrance de son oncle était grande, faisant en sorte que son oncle ne se souvenait plus de l’importance de cette date au moment de passer à l’acte. Les faits n’ont pas changé, mais devant ce même événement tragique, il n’éprouve plus de la colère envers cet oncle, mais plutôt de la compassion, de la bienveillance.
Un récit intérieur dont il faut prendre soin
En revisitant notre récit intérieur et en s’y attardant plus attentivement, celui-ci peut se transformer au fil du temps et nous permettre d’évoluer vers un mieux-être, adoucir nos souffrances et certaines épreuves que nous avons traversées, nous rendre plus résilients.
Revisiter notre histoire intérieure n’est pas qu’une affaire du passé : cela peut aussi nous permettre de changer de façon importante nos perceptions, nos attitudes, nos comportements au présent... jour après jour. Autant de bonnes raisons, d’y porter une attention particulière, et d’en prendre soin.