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Une firme québécoise est allée jusque dans la brousse pour sonder les électeurs en République démocratique du Congo

Le président actuel Félix Tshisekedi part en tête des intentions de vote selon la firme Léger

Une firme québécoise est allée jusque dans la brousse pour sonder les électeurs en République démocratique du Congo
Photo d'archives Agence QMI, Joël Lemay


Méfiance envers les sondeurs, villages qui changent de place, codes ethniques à respecter. C’est la firme québécoise Léger qui a relevé l’immense défi de réaliser le plus récent sondage électoral en République démocratique du Congo (RDC).

La firme Léger est bien connue des Québécois pour ses sondages politiques, mais peu savent qu’elle effectue aussi des sondages à l’étranger, comme dans plusieurs pays d’Afrique.  

En février dernier, 3119 Congolais ont été sondés par Léger sur leurs intentions de vote en vue des élections présidentielles de décembre prochain.  

Mais pour arriver à ces résultats, il a fallu relever tout un défi logistique, explique Jean-Marc Léger, président de la firme du même nom.  

Une cinquantaine d’intervieweurs issus de deux firmes locales ont dû se rendre sur le terrain pour interroger les électeurs en face à face, parfois dans des villages éloignés, en plus des traditionnelles entrevues téléphoniques.  

«On est toujours précis. C’est juste qu’il faut s’adapter culturellement», explique M. Léger.  

«Par exemple, si tu entres dans un village, il faut que tu ailles chercher l’accord du chef, sinon tu ne pourras pas faire les entrevues.» 

«Tu arrives dans un village sélectionné au hasard. Le problème, c’est qu’il a bougé parce que la récolte a bougé. Il n’est plus là! Donc il faut trouver le village. Ce n’est pas toujours simple.» 

Pourquoi une firme québécoise?

Pourquoi la présidence de cette ancienne colonie belge a-t-elle choisi de faire affaire avec une firme québécoise, plutôt qu’une firme européenne?  

«Ils sont attirés par le français et par la technologie nord-américaine» résume Jean-Marc Léger, qui rappelle que sa firme est le plus grand institut de sondage francophone hors France. 

La RDC est le pays francophone le plus populeux du monde, même avant la France. Mais au-delà de la langue officielle, plus de 200 langues différentes y sont parlées, comme le swahili et le lingala.   

À tous ces défis vient s’ajouter le fait que l’est du pays se trouve actuellement dans un contexte de grande insécurité en raison des actions de quelque 200 groupes armés, dont le M23, un groupe rebelle soutenu par le Rwanda.  

Selon les Nations unies, des centaines de civils ont été tués et plus de 5,6 millions de personnes ont été déplacées à l’intérieur du pays pour ces raisons.  

Jeune démocratie

La RDC est une jeune démocratie qui a tenu ses premières élections considérées libres en 2006.  

«C’est une démocratie extrêmement vibrante. Un peu cacophonique et parfois chaotique», avoue Jason Stearns, professeur à l’université Simon Fraser en Colombie-Britannique et fondateur du Congo Research Group. 

Les dernières élections ont été entachées par des irrégularités ayant mené à un gouvernement de coalition.  

Les résultats du sondage Léger commandé par le gouvernement de la RDC montrent que le président actuel, Félix Tshisekedi, récoltait à ce moment-là 43% des intentions de vote, loin devant ses deux principaux adversaires Moïse Katumbi Chapwe (21%) et Martin Fayulu (14%).  

Félix Tshisekedi est également le candidat qui a la plus grande notoriété, avec 94% des répondants disant le connaître.  

Une firme québécoise est allée jusque dans la brousse pour sonder les électeurs en République démocratique du Congo
AFP

Méfiance

Il n’y a toutefois pas de longue tradition de sondage en RDC, s’entendent pour dire les experts interrogés. 

«Il y a une grande méfiance. Les gens vont avoir tendance à penser que les résultats sont biaisés en faveur de ceux qui ont commandé le sondage», explique M. Stearns, dont le groupe de recherche a également réalisé des sondages en RDC par le passé.  

Denis Tougas a travaillé pendant 25 ans pour un organisme missionnaire en RDC, jusqu’en 2018.  

Selon lui, la majorité des gens y sont très conscients des failles de leur système. «Ils ont l’impression d’envoyer quelqu’un dans la capitale Kinshasa qui ne va pas vraiment agir.» 

«Les gens se battent pour s’inscrire sur les listes électorales [...] Et encore là, il y a beaucoup de magouille. Certains achètent leurs cartes», illustre M. Tougas.  







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