Immigration: là où le Québec est différent du Canada
Léger

On aurait envie d’envoyer ce sondage à tous les gens qui répètent, comme des perroquets, que le Québec est si passéiste, si fermé sur lui-même, si xénophobe.
Sur la perception de l’immigration entre les Québécois et les Canadiens, selon un sondage Léger paru dans nos pages, il n’existe aucune différence. Zéro comme dans Ouellet.
Voici quelques preuves à l’appui.
Un, pratiquement autant de Québécois que de Canadiens voudraient que le pays augmente ses seuils d’immigration.
Deux, autant de Québécois que de Canadiens (42 %) estiment que le Canada devrait diminuer le nombre d’immigrants accueillis au pays.
Et partout on a une vision positive de l’immigration : une solution pour la pénurie de main-d’œuvre, une source de croissance économique, une solution pour le vieillissement de la population...
Les différences, elles existent
Sur le plan des perceptions, tout le monde s’entend.
Alors, pourquoi on ne s’entend pas sur tout le reste ?
Au Canada anglais, il s’est installé une logique du « toujours plus » chez les élites.
Un unanimisme règne, chez les partis politiques de gauche comme de droite, chez le patronat et les organismes communautaires.
Le débat sur l’immigration est absent, particulièrement dans les médias. Un petit coup d’œil du côté de la presse anglophone nous le fait constater.
Que très très très rarement, on réfléchit sur la capacité d’intégration dans l’autre solitude. C’est une notion inconnue là-bas d’ailleurs.
L’immigration n’est plus tant une question politique au Canada. Elle est devenue strictement morale. Je dirais même identitaire : le Canada veut se définir comme un « World moral model », le grand Modèle planétaire de la morale, notamment par ses politiques d’immigration.
Regardez même la différence chez les partis politiques.
Au Québec, aucun parti, ni même QS et le PLQ, ne propose des seuils d’immigration similaires aux libéraux, conservateurs et néo-démocrates fédéraux.
Quelle intégration ?
Il y a une autre différence : nous sommes plus exigeants quant à l’intégration des Néo-Québécois. Nous en demandons plus.
Dans le Canada anglais, une intégration se résume à avoir une job et le respect des lois. Ça s’arrête là, pas besoin de participer à une vie culturelle commune, car de toute façon, il n’y aurait pas de culture majoritaire au Canada.
No core identity, disait Justin Trudeau.
Au Québec, une intégration passe par le français et la participation à une « culture de convergence ». Qui serait aussi transformé par les minorités culturelles.
On est au cœur de la différence entre le multiculturalisme canadien et l’interculturalisme québécois, ici.
Le problème, c’est que si le Canada a officialisé le multiculturalisme dans sa Charte, le Québec n’a jamais officialisé son propre modèle d’intégration.
Il n’est inscrit nulle part, dans aucune loi ou charte.
Et donc, mettez-vous à la place d’un immigrant au Québec.
Il arrive au Canada, pays officiellement bilingue, mais s’installe en même temps à un endroit où la seule langue officielle est le français. Il arrive au Canada où la politique d’intégration est le multiculturalisme, mais qui est rejeté par le Québec qui a un autre modèle d’intégration.
Comment ne pas voir que la confusion s’installe ?
L’idée d’officialiser l’interculturalisme dans une loi traîne depuis longtemps.
Ça pourrait être un excellent chantier pour le gouvernement Legault qui veut incarner la différence québécoise au sein du Canada.