Pour la gloire d’Artur
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C’en était presque touchant. Personne ne s’était concerté. Mais Leïla Beaudoin qui se remet d’une défaite serrée au Mexique l’a bien dit. Quand elle a commencé à boxer à 17 ans, jamais elle n’aurait pu s’imaginer qu’un soir, elle serait sur la carte d’une finale d’Artur Beterbiev.
Wilkens Mathieu qui n’a que 18 ans, mais 20 ans de connaissances de la boxe, l’a aussi dit. Dans d’autres mots, mais l’essentiel était le même. Quel grand honneur que de boxer dans un gala dont la tête d’affiche est Artur Beterbiev.
Christian Mbilli, le plus québécois des Français après l’avocat Maurice Renoux, a trouvé d’autres mots. Ça lui donne des frissons de se battre en demi-finale d’Artur Beterbiev, son modèle et son inspiration.
Le grand champion tchétchène et québécois ne pouvait entendre ces hommages sincères venant de bons boxeurs pratiquant le même métier que lui puisqu’il est déjà en pré-camp d’entraînement quelque part dans le Caucase en Russie.
Mais Artur est Artur et s’il est aussi dominant à 38 ans dans une division remplie de grands boxeurs, c’est parce qu’il s’entraîne comme un déchaîné, qu’il n’a jamais bu une goutte d’alcool et que ses loisirs sont consacrés à faire de beaux enfants qui naissent au Québec et qui apprennent le français.
J’étais à Londres en janvier au O2 Arena pour voir Beterbiev gagner par knock-out contre Anthony Yarde. Il y avait 20 000 spectateurs. Jamais Martin Tremblay, le patron de Gestev et du Centre Vidéotron, n’a-t-il dit aussi juste quand il a déclaré en conférence de presse « que toutes les grandes capitales de boxe mourraient d’envie de présenter ce combat ». Il a raison. Ç’aurait dû être New York, Las Vegas, Dubai ou Londres. Personnellement, j’étais convaincu que le « Callum Smith vs Artur Beterbiev » serait présenté au O2 Arena à Londres. C’était 20 000 spectateurs assurés, une grosse télé avec Sky et ESPN et un des deux plus importants promoteurs au monde en Eddie Hearn.
Surprise gigantesque
Que cette grande bataille, sans doute la plus difficile dans la carrière de Beterbiev, soit présentée à Québec, est une surprise gigantesque dans l’univers de la boxe.
Mais Camille Estephan avait plusieurs bonnes cartes à jouer. « Quand je suis allé à Londres pour Beterbiev contre Yarde, j’ai parlé à tout le monde qui comptait. Bob Arum, Brad Jacobs, Carl Moretti et surtout l’avocat Jeremy Koegel. Je leur ai fait savoir que j’étais intéressé à présenter la prochaine défense d’Artur Beterbiev. En plus, nous sommes partenaires avec Top Rank pour Arslanbek Makhmudov et Simon Kean et nous avons un contrat avec ESPN+. On se connaît et on se fait confiance », de dire Estephan.
En plus, Eye of The Tiger pouvait garantir l’organisation et la présentation d’une énorme carte pour mettre en valeur le joyau Beterbiev-Smith. Le combat entre Beterbiev et Marcus Browne avait été présenté au Centre Bell, mais la sous-carte n’avait pas convaincu les partenaires américains. Ni même la Régie des alcools, des courses et des jeux.
Le gala de la relance
J’étais avec Michel Hamelin, qui fut dans les dernières décennies inspecteur à la Régie et surtout, grand patron de la sécurité de la boxe, et on se demandait quand est-ce qu’on avait eu droit à un gala aussi relevé.
Artur Beterbiev, Christian Mbilli, Simon Kean, Wilkens Mathieu, Leïla Beaudoin, Clovis Drolet et Mary Spencer qu’on devrait confirmer dans les prochains jours et il va s’en ajouter d’autres...
Quand avons-nous eu droit à mieux ? Michel Hamelin a rappelé le premier combat entre Jean Pascal et Bernard Hopkins au Colisée de Québec. Il y a aussi Lucian Bute contre Jean Pascal au Centre Bell. Ou David Lemieux contre Billy Joe Saunders à la Place Bell. Ou peut-être Adonis Stevenson contre Chad Dawson au Centre Bell ?
Ce furent de grands combats. Mais quand on va vérifier les sous-cartes sur BoxRec, on réalise qu’il y avait souvent des noms de boxeurs étrangers mal connus du public et très peu de locaux de grande qualité. Cette fois, ça s’annonce comme un joyeux happening. Les dix ans de travail acharné d’EOTTM payent des dividendes.
On va savoir si la pandémie a complètement détruit la boxe québécoise. Mais déjà, hier au Centre Vidéotron, on sentait une fébrilité nouvelle. Ou inhabituelle.
Va y avoir de belles histoires à raconter et de beaux combats pour faire vibrer même le profane.
Pis, si ça marche pas, si le public se traîne les savates, le O2 Arena à Londres, c’est juste six heures d’avion. Dans la vie, faut parfois mériter ce qu’on veut avoir...
Lady Panther en rouge
Je ne pensais jamais vivre ça. Lundi soir, après avoir roulé de Charlotte en Caroline du Sud jusqu’à Sainte-Adèle, je suis entré dans la maison à 11 heures et quart. Le temps de rentrer les valises, il était minuit moins quart quand j’ai enfin pu me glisser dans le lit.
— « On a-tu gagné ? » m’a demandé Lady Ju.
Le « on » désignait les Panthers de la Floride. Lady Ju qui se fout totalement du hockey ne s’est pas informée si j’étais très fatigué après avoir conduit pendant 17 heures. Non. « On a-tu gagné ? » est la seule question qui importait. On est fan ou pas.
Ben oui, on a gagné. Et j’ai tellement fait de voiture que j’ai le mal des transports dans le lit.
Mais elle était déjà rendormie.
Lady Panther n’est pas la seule au Québec à être tombée amoureuse des Panthers. Que la Floride soit couverte de « P’s fans », c’est normal. Mais le Québec ?
Beaux et hargneux
La vérité, c’est que les Panthers sont beaux. Sont hargneux. Sont méchants quand il le faut. Sont teigneux quand ils veulent le puck. Pis eux autres, ils gagnent.
Et la vérité, c’est qu’on sous-estime le lien qui unit les Québécois avec la Floride. Ils sont des centaines de milliers de vacanciers qui passent quelques semaines ou quelques mois à Fort Lauderdale, Boca Raton ou Miami à chaque hiver.
Ils sont des milliers à assister à une couple de matchs des Panthers. De toute façon, ça coûte trop cher aller applaudir le Canadien.
Ça a créé un fond de sympathie. La terre a été labourée.
Ça fleurit de rouge Panther...