Crise du logement: Une mère et sa fille autiste plus proches que jamais de se retrouver dans la rue
Les loyers sont devenus beaucoup trop chers pour qu'elles puissent se loger à Toronto
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La crise du logement qui frappe Toronto et Vancouver est annonciatrice de ce qui s'en vient bientôt au Québec. Le Journal est allé rencontrer des résidents aux expériences cauchemardesques qui peinent à trouver des loyers décents et abordables. Voici l'un des témoignages que nous avons recueillis dans le cadre de ce dossier.
Après des mois à chercher un appartement, des dizaines de refus et des années d’attente pour un logement social, une mère et sa petite fille de 8 ans vivent dans l’angoisse de bientôt devoir aller vivre dans un refuge pour éviter la rue.
«Je ne sais pas ce que je vais faire ni où on va se retrouver... Ça fait des mois que je cherche et je ne trouve rien que je peux me payer. Est-ce que ma seule solution, ça va être d’aller dans un refuge avec ma fille autiste?» s’inquiète Jackie Gilmore, 40 ans.
Le 1er décembre, lorsqu’elle a reçu un avis d’éviction de la part de sa propriétaire, un coup de massue s’est abattu sur la mère monoparentale, qui vit avec sa fille de 8 ans, Meadow, à Toronto.
C’est que sa locatrice veut reprendre le minuscule appartement qu’elle a aménagé dans son sous-sol où le plafond ne fait pas plus d’1m75 de haut et qui n’a aucune sortie de secours.
«Ça me coûte 1600$ par mois, mais ça comprend internet, la laveuse et surtout, c’est à quelques secondes de l’école de ma fille», explique Mme Gilmore, qui attend un logement social depuis 13 ans.
Depuis le mois de décembre, cette dernière cherche intensément un nouveau logement, mais impossible de trouver quelque chose qui rentre dans son budget. En attendant, elles restent dans leur logement, malgré l’avis d’éviction.
«On n’a juste pas le choix», confie la mère de famille, qui dénonce certains propriétaires qui demandent aux locataires d’être véganes ou d’une nationalité particulière pour accéder à certains logements.
Ne plus manger
Jackie Gilmore reçoit 2900$ de l’aide sociale ontarienne mensuellement pour ses problèmes de santé qui l’empêchent de travailler, mais aussi pour sa fille qui vit avec des troubles de l’autisme et des troubles du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH).
«Je cherche un appartement avec deux chambres, que ma fille puisse enfin avoir sa propre chambre, mais il n’y a plus rien en dessous de 2500$! Et ça, c’est ce qu’il y a de moins cher!», s’agace-t-elle.
Et avec la hausse du coût de la vie, la situation ne fait qu’empirer et inquiéter davantage cette mère qui a fui la violence conjugale.
«Il y a plein de jours où quand je cuisine pour ma fille, je suis tellement stressée que je ne mange pas pour qu’elle puisse avoir de la nourriture toute la semaine, laisse tomber Jackie Gilmore. On ne peut plus vivre... Le gouvernement nous oblige à choisir entre nous nourrir et avoir un toit.»
Pour cette dernière, qui tente de rester forte pour sa fille, les différents gouvernements ont laissé tomber les plus démunis avec leur inaction face à la crise du logement.
Même pas à trois
Pour mettre plus de chances de son côté, Jackie Gilmore tente de trouver un appartement avec sa mère, Sarah. Mais même là, impossible de se faire accepter par un locateur.
«On pensait qu’ensemble ça irait mieux, mais finalement, même pas», explique Sarah Gilmore, 58 ans, qui a elle aussi été évincée de la maison qu’elle occupait depuis 17 ans l’année dernière.
«J’appelle tous les gens que je connais qui pourraient nous aider, mais il n’y a personne», dit la grand-mère de Meadow, qui a encore les larmes aux yeux quand elle se rappelle avoir dû se défaire de tous ses biens et de ses souvenirs lors de son éviction.
«J’ai une amie qui est obligée de vivre dans un refuge, je ne veux pas finir là et encore moins y voir ma fille et ma petite-fille», désespère-t-elle.