Patrick Roy raconté par Jonathan Marchessault, Bob Hartley, Anthony Duclair, Angelo Esposito et plusieurs autres
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La passion et cette volonté de gagner, chaque soir. Aux yeux de la dizaine d’anciens joueurs, adjoints et proches collaborateurs à qui Le Journal a parlé dans les derniers jours, c’est ce qui a défini Patrick Roy, le gardien aux quatre coupes Stanley, mais aussi Patrick Roy, l’entraîneur-chef. Celui qui tente maintenant d’ajouter une seconde coupe Memorial à son prestigieux palmarès, dans ce qui devrait être sa «dernière danse» derrière le banc des Remparts.
«Je pense qu’il nous a vraiment donné le goût de gagner. En fait, il nous a appris à détester perdre. Ce qu’il voulait, au fond, c’était nous voir travailler le plus fort possible», lance d’emblée l’ex-attaquant Angelo Esposito, qui a enlevé les grands honneurs du hockey junior canadien à la première année de Roy comme entraîneur.
Esposito en est à sa première année dans l’uniforme rouge des Remparts quand Patrick Roy prend la barre de l’équipe, en 2005. Le club, dont il est alors le co-propriétaire et le directeur général, n’a, à ce moment, remporté qu’une seule de ses cinq premières rencontres.
Roy, l’homme qui a fait ses classes
Mais à l’époque, même s’il n’est retraité du hockey professionnel que depuis deux ans, Roy a déjà fait ses classes, rappelle Bob Hartley.
Avant de prendre le poste chez les Remparts, l’ancien gardien a entraîné l’équipe bantam AA de Beaubourg (Beauport et Charlesbourg) avec son ami et éventuel adjoint, Claude Lefebvre.
Pourtant, «il n’avait pas besoin d’aller coacher à ce niveau», soulève Hartley, qui a dirigé Roy au Colorado.
«Il aurait pu aller directement dans la LNH et réussir de grandes choses, croit-il. Mais ça démontre sa passion, son désir de toujours être le meilleur.»
L’éternel numéro 33 redresse la barre du navire à la déroute et l’équipe remporte cette même année sa première coupe Memorial depuis 1971.
Un fait d’armes épatant, puisque cette bague est considérée comme l’une des plus difficiles à mettre à son doigt, compte tenu du long parcours qui mène jusqu’à l’ultime victoire.
Mais ce n’est rien de surprenant aux yeux de ceux qui l’ont côtoyé de près. «Il avait toujours les bons mots pour nous motiver. Il savait toujours aller chercher la petite flamme en dedans de nous», explique l’ancien défenseur Mikaël Tam, qui s’est joint aux Remparts en 2007, et qui a été entraîné par Patrick durant cinq ans.
Roy, l’entraîneur qui demande conseil
Roy a ce désir, aussi, de constamment s’améliorer. Car tant Tam que les adjoints Martin Laperrière (2005 à 2020) et Lefebvre (2006 à 2011) décrivent Roy comme un entraîneur «qui consulte beaucoup ceux qui l’entourent».
«On a aussi souvent appelé des coachs de la Ligue nationale pour avoir leur avis. C’est bon, parfois, de penser en dehors de la boîte», mentionne Laperrière.
Loin de l’image, donc, de l’homme qui veut tout contrôler par laquelle Patrick Roy est parfois dépeint.
Roy, l’homme «dur, mais juste»
S’il y a un cliché concernant l’homme de 57 ans qui est toutefois avéré, selon les intervenants sondés, c’est celui de l’entraîneur «exigeant».
«Dur», même. Mais juste, aussi, soulignent Tam et Marc-Édouard Vlasic, le défenseur des Sharks qui est à ce jour le plus prolifique «poulain» de Roy dans la LNH. «Il y a des fois où je me suis fait rentrer dedans. Il me challengeait», pointe Tam.
«À l’époque, il était extrêmement sévère, souligne l’attaquant Jonathan Marchessault, des Golden Knights, qui a joué pour l’ancien gardien de 2007 à 2011. [...] C’était tellement un coach difficile que je pense que ça sortait le meilleur de la plupart des joueurs.»
Certains de ses anciens protégés soulèvent d’ailleurs que pareille pression n’était pas faite pour tous.
«J’ai eu des coéquipiers qui ne l’ont pas aimé, mais ceux qui étaient là pour les bonnes raisons, qui voulaient gagner, eux l’ont aimé, mentionne Tam. Parce que Pat, si tu lui en donnais, si tu appliquais ce qu’il demandait, tu allais devenir un de ses hommes de confiance.»
«Il était un gars strict qui coachait avec passion, et il voulait juste le meilleur pour ses joueurs. Il a parfois été dur avec moi, mais souvent très bon», ajoute Anthony Duclair, désormais l’un des attaquants des Panthers.
Roy, le coach «visionnaire» et «travaillant»
Roy faisait aussi « tout pour aider ses joueurs », pointe Esposito, qui vivait à cette époque avec la pression d’être l’un des plus beaux espoirs du hockey junior.
«Les Remparts ont été l’une des premières équipes à embaucher un entraîneur qui s’occupait du conditionnement physique. Et si on avait besoin d’un psychologue, si un joueur avait des problèmes hors glace, l’équipe et lui faisaient tout pour que l’on connaisse tout du sujet», louange-t-il.
Si Tam le décrit comme «un excellent stratège», il se souvient aussi d’un entraîneur qui ne comptait pas ses heures.
«ll est au bureau à 6h50 ou 7h tous les matins et il n’est pas assis à lire les nouvelles, confirme Benoît Desrosiers, son adjoint depuis son retour à Québec, en 2018. Il regarde des vidéos sans arrêt. C’est un gars qui voudrait essayer 122 affaires.»
«Je dois parfois le calmer un peu, poursuit-il. Il veut tellement que tout soit parfait. Le mot passion n’est même pas assez fort.»
Roy, l’entraîneur qui s’est adapté
Mais si Patrick Roy est demeuré aussi passionné entre son premier et son second séjour derrière le banc des Remparts, qui ont été ponctués notamment d’un passage de trois ans chez l’Avalanche, il a également beaucoup changé au fil des ans, croient ses acolytes et anciens joueurs.
Une ou deux fois par année, Marchessault s’entraîne avec les Remparts. Il a découvert un entraîneur toujours exigeant, mais plus conscient de ce qui différencie chacun de ses protégés.
«Il comprend les situations, il sait qui pousser plus que d’autres, et c’est ce qui fait sa force maintenant. C’est aussi pourquoi [les Remparts] ont connu autant de succès dans les dernières années», affirme-t-il.
Tam a constaté la même chose lorsqu’il a agi comme «adjoint» pendant trois mois chez les Remparts, en 2020. Il a vu un coach qui s’est bien adapté à la nouvelle génération, qu’il estime différente de la sienne.
«J’ai vu que Pat avait changé son approche. Ça démontre aussi à quel point ce n’est pas un gars têtu pour qui my way is the highway.»
«Si jamais il se retire, il aura connu une carrière incroyable, sourit-il. C’est lui qui a mené les Remparts où ils sont maintenant, avec Jacques Tanguay et tous les autres. Il a gagné la coupe Memorial une fois, mais avec ce qui se passe en ce moment, je ne serais pas vraiment surpris s’il la soulevait une deuxième fois.»
«Et je lui souhaite.»
- Avec la collaboration de Stéphane Cadorette, de Kevin Dubé et de Mylène Richard