Les combats font rage au Soudan, où 180 corps non identifiés ont été enterrés
Raids aériens, tirs d’artillerie et explosions ont de nouveau secoué Khartoum samedi, alors que les combats meurtriers entre l’armée et les paramilitaires au Soudan, qui entrent dans leur huitième semaine, ont forcé des volontaires à enterrer 180 corps non identifiés.
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Le bruit des combats résonne dans la banlieue nord de Khartoum et une pluie d’obus s’est abattue sur le sud de la capitale en faisant plusieurs blessés parmi les civils, rapportent samedi des habitants à l’AFP.
L’armée, dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane, a visé avec ses avions des positions des paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo, qui ont répondu par des tirs de batterie antiaérienne, selon d’autres habitants de la capitale.
Depuis le début le 15 avril de la guerre sanglante entre les deux généraux rivaux, les humanitaires et les volontaires éprouvent, selon eux, des difficultés à récupérer les corps «en raison de contraintes de sécurité».
Le Croissant-Rouge soudanais a indiqué dans un communiqué, samedi, que 180 corps non identifiés ont été enterrés: 102 dans le sud de Khartoum et 78 au Darfour.
Le conflit a déjà coûté la vie à plus de 1800 personnes et fait plus d’un million et demi de déplacés et de réfugiés.
Des pourparlers en Arabie saoudite entre des émissaires des belligérants avaient pourtant abouti à un engagement de principe pour «protéger les civils» et permettre de «collecter, enregistrer et enterrer les morts en coordination avec les autorités compétentes».
Mais l’armée s’est retirée mercredi de ces négociations et le lendemain les États-Unis et l’Arabie saoudite disaient les suspendre officiellement.
Bloqués aux portes de la capitale
Parallèlement, l’Union africaine et l’IGAD, le bloc régional d’Afrique de l’Est dont fait partie le pays, se sont dits prêts à mettre en œuvre une feuille de route au Soudan, l’un des pays les plus pauvres au monde.
Samedi, un émissaire du général Daglo a rencontré le président kenyan, William Ruto, à Nairobi, a affirmé ce dernier sur Twitter.
Malgré l’annonce de sanctions américaines contre l’armée et les paramilitaires, les combats aux armes lourdes continuent de faire des victimes chaque jour, les pillages se poursuivent et le nombre de déplacés ne cesse d’augmenter.
«Les forces de sécurité doivent protéger et non mettre en danger leurs concitoyens», a indiqué dans un communiqué l’ambassade américaine à Khartoum, en référence aux deux camps rivaux.
Dans la capitale soudanaise, les civils sont privés d’eau courante et confrontés à une pénurie de liquidités et à des coupures de courant.
Les chauffeurs des bus assurant la liaison entre Khartoum et ses provinces ont déclaré à l’AFP, samedi, «être bloqués par les autorités aux portes de la capitale» de plus de cinq millions d’habitants.
Mercredi au moins 18 civils ont été tués par les tirs d’artillerie et les bombardements aériens de l’armée sur un marché de Khartoum. Les experts disent craindre une offensive massive de l’armée après l’annonce du redéploiement de ses troupes dans la capitale.
En face, les FSR continuent de prendre leurs quartiers dans des hôpitaux ou des maisons de civils.
Mission de l’ONU prolongée
La situation est encore plus grave au Darfour, frontalier du Tchad, et risque d’empirer avec l’approche de la saison des pluies, synonyme au Soudan de recrudescence du paludisme, d’insécurité alimentaire et de malnutrition infantile.
Des déplacés arrivés sur place ont déclaré à Médecins sans frontières (MSF) qu’ils avaient vu «des hommes armés qui tirent sur les personnes cherchant à fuir à pied, des villages pillés et des blessés qui agonisent».
Des témoins font état à l’AFP, samedi, de combats autour de la ville de Kutum, au Darfour-Nord.
Alors qu’un tiers des 45 millions de Soudanais ont besoin d’assistance humanitaire, les cargaisons d’aide arrivées par les airs sont bloquées aux douanes et le personnel international se voit refuser les visas pour venir relever des employés locaux exténués ou terrés chez eux.
Dix-huit humanitaires ont été tués depuis le début du conflit.
Vendredi, le Conseil de sécurité de l’ONU a prolongé de seulement six mois la mission politique des Nations unies au Soudan, dont le chef, Volker Perthes, n’est plus le bienvenu dans le pays en plein conflit meurtrier.
Le général Burhane a réclamé, la semaine dernière, le limogeage du chef de la mission, lui faisant porter la responsabilité de la guerre. Mais le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a exprimé sa «confiance absolue» envers M. Perthes.