Les Québécois ne sont plus C.R.A.Z.Y. de leur cinéma
Durocher

Le hasard fait bizarrement les choses.
La semaine dernière, on a pleuré la mort de Michel Côté, un acteur de cinéma adoré, ET on a appris que Radio-Canada remplaçait le Gala Québec Cinéma par une émission hommage au cinéma québécois de 90 minutes.
Pourquoi je place ces deux informations côte à côte ?
Parce que Michel Côté a connu l’âge d’or du cinéma québécois. Les belles années. Dans la pluie d’éloges de Michel Côté, des générations de Québécois se sont rappelés, la larme à l’œil, les C.R.A.Z.Y., Cruising Bar, Piché : entre ciel et terre ou Liste noire.
La semaine où on annonce la mort de Michel Côté, on ne peut que constater une certaine mort du cinéma québécois...
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QUEL LIEN AFFECTIF ?
Je n’ai pas versé une larme quand on a appris que Radio-Canada mettait la hache dans le Gala Québec Cinéma (qui remplaçait les Jutra). La formule des galas a fait son temps. Un petit milieu qui s’« autocongratule », ça n’intéresse pas le grand public.
Alors quand j’ai appris que Karine Vanasse allait animer en décembre une émission hommage au cinéma québécois produite par France Beaudoin, j’ai applaudi.
Mais je me pose quand même une question : quand Radio-Canada dit que l’émission sera « conçue spécifiquement pour accentuer le lien affectif du public avec le cinéma d’ici, en faisant écho aussi bien aux films à l’affiche qu’à d’autres en production », je me demande si le « lien affectif » est encore là.
Quand on nous annonce qu’il y aura « des images tournées en coulisses et sur des plateaux de tournage, afin de témoigner de l’enthousiasme des artistes comme des gens pour le cinéma d’ici », je me demande de quel enthousiasme on parle.
Les Québécois aiment-ils encore leur cinéma ?
Voici ce que Cinéac (qui compile les données du box-office au Québec) a publié en janvier sur la comparaison 2021-2022.
« La performance du cinéma américain a augmenté, passant de 71,7 % en 2021 à 83,2 % en 2022. La cinématographie québécoise a, quant à elle, connu une baisse de son pourcentage, de 12,4 % en 2021 à 7,3 % en 2022. Le film québécois 23 décembre se retrouve dans notre Top 20 annuel au 18e rang, avec des gains de 1 755 583 $ ».
Je le répète, au cas où ce ne soit pas clair. L’année dernière, sur les 20 films les plus vus au Québec, on ne compte qu’un seul film québécois. Et il est en 18e position ! Il y a plus de Québécois qui sont allés voir DC Krypto Super-Chien (DC League of Super pets), que de Québécois qui ont vu 23 décembre ! Il y a eu d’excellents films québécois en 2022. Confessions, le chef d’œuvre de Luc Picard, n’est pas dans la liste des 20 films les plus vus de l’année.
UN SUPER CHIEN
Je vous pose la question : pourquoi préférez-vous aller voir Krypto (un dessin animé sur le chien de Superman, entouré d’une tortue et d’un écureuil aux superpouvoirs qui combattent le cochon d’Inde de Lex Luthor) plutôt que Chien blanc, l’excellent long-métrage d’Anaïs Barbeau-Lavalette, qui a récolté un maigre 255 000 $ au box-office ?
Qu’est-ce qu’on peut faire pour que les Québécois retombent en amour avec leur cinéma, comme à l’époque où Michel Côté jouait dans C.R.A.Z.Y. ?