Beaucoup d’immigrants travaillent en anglais même s’ils ont étudié au Québec
Les personnes qui n’ont jamais mis les pieds au Québec avant d’immigrer utilisent davantage le français au travail que ceux qui y ont travaillé ou étudié avant d’être admis.
• À lire aussi: Sept constats sur le français et l’anglais au Québec
• À lire aussi: For service in English, please wait 34 seconds...
• À lire aussi: Le ministre Drainville présente son plan de match pour renforcer le français à l’école
C’est l’un des constats que dresse le Commissaire à la langue française, Benoit Dubreuil, dans son premier rapport annuel, déposé mercredi au parlement.
Selon des données de Statistique Canada extraites par le commissaire, seulement 55,2% des personnes qui ont eu un permis d’étude et un permis de travail avant d’être reçu comme immigrant au Québec parlent le plus souvent le français avec leurs collègues.
À titre de comparaison, la langue de Molière est utilisée de façon prédominante par près de 64% des immigrants économiques qui sont admis chez nous sans avoir jamais eu ces permis. Et chez les demandeurs d’asile, la proportion est encore plus élevée, alors que près du deux tiers d’entre eux utilisent principalement le français au travail.
- Écoutez la rencontre Lisée - Mulcair avec Richard Martineau diffusée chaque jour en direct 8h50 via QUB radio :
«C’est paradoxal que les deux groupes qui font le mieux sont les personnes qui n’ont jamais mis les pieds au Québec», a souligné Benoit Dubreuil en entrevue avec l’Agence QMI.
Pour le commissaire, ce phénomène étonnant s’explique peut-être par le fait que les gens qui n’ont pas d’expérience au Québec comme étudiant ou comme travailleur doivent obtenir de meilleurs résultats pour ce qui est de la langue dans la grille de sélection des immigrants.
«C’est dur d’être sélectionné si on ne parle pas français et qu’on n’a aucune expérience préalable au Québec», explique-t-il.
Au contraire, les immigrants ayant étudié au Québec sont nombreux (34,8%) à travailler principalement en anglais, un signe que le marché du travail québécois peut être un milieu de francisation ou d’anglicisation, pense le commissaire. «Ça dépend où on se trouve», a-t-il dit.
«Je trouve en soi que c’est quelque chose d’assez intéressant. On a adhéré à l’idée que passer du temps au Québec avant d’immigrer, c’est bon pour la langue. C’est bon pour l’intégration au marché du travail, il n’y a pas de doute là-dessus, mais curieusement, ça n’entraîne pas nécessairement un usage plus fréquent du français», a expliqué M. Dubreuil.
Rappelons que la révision des programmes d’immigration présentée à la fin mai par la ministre de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration, Christine Fréchette, prévoit que les étudiants étrangers qui étudient en français ou qui sont francophones bénéficieront d’allégements pour favoriser leur rétention.
Le rôle de l’enseignement supérieur
Dans son rapport, le commissaire rappelle par ailleurs que le fait d’avoir effectué ses études postsecondaires en anglais est étroitement lié à l’utilisation de la langue de Shakespeare sur le marché du travail et dans l’espace public.
Et comme «une grande part de la population étudiante est composée aujourd’hui d’étudiants étrangers, dont plusieurs aspirent à s’établir au Québec durablement», il estime qu’il est nécessaire d’approfondir la réflexion sur le rôle des cégeps et des universités dans l’intégration en français des immigrants.