
Pour qui voterons-nous le 1er octobre? Le Journal vous propose à partir d’aujourd’hui 10 août deux outils qui vous permettront de mieux répondre à cette question.
D’abord, une «radiographie des candidats», un portrait statistique détaillé de celles et ceux qui sollicitent notre vote.
Ensuite, un «guide de l’électeur», une présentation exhaustive des personnes candidates dans chaque circonscription.
Ces deux portraits s’affineront jusqu’à la fin de la période de mise en candidature, à la mi-septembre, grâce à nos pages web évolutives et grâce à des articles synthèses et des analyses publiés sur toutes nos plateformes.
Suivez l'évolution en ligne afin de pouvoir mieux répondre à la question: «Pour qui vais-je voter le 1er octobre?»
Si la tendance se maintient, jamais il n’y aura eu, dans l’histoire du Québec, autant de candidates qu’au scrutin de 2018. Et le 1er octobre pourrait voir l’élection d’un nombre record de femmes.
C’est ce qui se dégage d’une compilation réalisée par notre Bureau d’enquête à partir des 377 candidatures sur 500 déjà annoncées par les quatre partis représentés à l’Assemblée nationale.
En date du 10 août, près d’un candidat sur deux (45 %) est une femme.
Puisque les partis ont jusqu’au 15 septembre pour boucler leur liste de candidats dans les 125 circonscriptions, le portrait général évoluera d’ici là.
Campagne paritaire
Les quatre partis se sont donné pour mission d’atteindre une «zone paritaire», c’est-à-dire au moins 40 % de candidates. À moins de deux mois du scrutin, la plupart sont en positon d’y parvenir.
Seul le Parti québécois est en retard, avec 37 % de candidates au moment d’écrire ces lignes. C’est d’ailleurs, pour le moment, le seul parti à ne pas avoir amélioré sa fiche par rapport au scrutin de 2014, lorsque la formation, alors dirigée par Pauline Marois, avait présenté la même proportion de femmes.
Si Québec solidaire mène le bal en matière de parité, le parti qui se définit comme féministe compte 53 % de candidates. Depuis 2007, il présente autant de femmes que d’hommes à chaque scrutin.
La remontée la plus spectaculaire a été effectuée par la CAQ, dont 48 % des candidats actuels sont des femmes. Lors des deux dernières campagnes, en 2012 et en 2014, le parti de François Legault n’avait réussi à recruter que 23 % et 21 % de candidates, ce qui faisait de lui le dernier de classe.
«La féminisation de la CAQ saute aux yeux», a réagi Manon Tremblay, auteure du livre 100 Questions about Women in Politics, qui paraîtra cet automne.
En 2014, M. Legault n’avait pas osé s’engager à nommer un gouvernement paritaire s’il prenait le pouvoir et avait déclaré que la compétence devait primer dans le choix des candidats.
Son changement de cap à cet égard semble lui profiter. «La dernière remontée de la CAQ dans les sondages montre que l’appui des femmes a rejoint celui des hommes, souligne Eric Montigny, professeur de science politique à l’Université Laval. Est-ce que c’est l’effort perçu de la CAQ de recruter davantage de femmes? C’est possible.»
Finalement, avec ses 42 % de candidates, le PLQ fait beaucoup mieux qu’en 2014, lorsqu’il n’en comptait que 28 %, mais il demeure pour l’instant troisième en la matière.
La CAQ avantagée?
En ce qui concerne l’atteinte de la parité dans les candidatures, la CAQ pourrait être avantagée, le parti étant le seul à ne pas tenir de course à l’investiture dans ses circonscriptions et tous les candidats étant choisis par le chef.
«Les études démontrent toujours que les investitures sont souvent déterminées par l’old boys’ network», souligne Mme Tremblay. Et en fin de compte, c’est la volonté du chef qui a le plus d’influence. D’ailleurs, Québec solidaire parvient à proposer la parité même avec des courses à l’investiture.
Pas sacrifiées
L’analyse des candidatures montre aussi que les femmes ne sont pas nécessairement envoyées à l’abattoir dans des circonscriptions qu’elles n’ont aucune chance de remporter.
C’est pourtant le sort qui est souvent réservé aux candidates lors des élections fédérales, selon une étude réalisée en 2012 par les universitaires Melanee Thomas, de l’Université de Calgary, et Marc André Bodet, de l’Université Laval.
Au Québec, cette théorie ne se vérifie pas. Seulement 36 % des candidats qui se présentent dans des circonscriptions perdues d’avance (le château fort d’un adversaire) sont des femmes.
Les candidatures féminines
2018 (10 août) |
2014 | 2012 | 2008 | 2007 | |
% | 45% | 30% | 28% | 31% | 31% |
PLQ | 42% | 28% | 38% | 32% | 35% |
PQ | 37% | 37% | 27% | 31% | 33% |
CAQ/ADQ | 48% | 23% | 22% | 20% | 22% |
QS | 53% | 50% | 50% | 53% | 53% |
La CAQ et le PLQ ont rejeté il y a quelques mois la proposition du Groupe femmes politiques et démocratie d’obliger tous les partis à respecter une zone paritaire dans les candidatures pour le scrutin de 2022.
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Pour la première fois depuis 50 ans, les jeunes et la génération X auront plus de poids que les baby-boomers aux urnes. «Il faut remonter au début des années 70 pour voir ça, c’est majeur», affirme Eric Montigny, professeur à l’Université Laval. Les équipes de candidats plus jeunes auront-elles davantage de succès auprès des jeunes électeurs?
En date du 10 août, les candidats sont un peu plus vieux que la moyenne des Québécois. La moyenne d’âge des candidats annoncés aux élections du 1er octobre est de 46 ans, légèrement au-dessus de l’âge moyen de l’ensemble de la population québécoise: 42 ans.
En 2014, la moyenne d’âge des candidats était de 43 ans. Ceux qui ont été élus étaient toutefois plus âgés, puisque la moyenne d’âge des députés de l’ancienne législature était de 51 ans.
- Pour le moment, c’est dans la tranche d’âge des 50-59 ans que l’on retrouve le plus de candidatures, soit 29 %. Le deuxième groupe d’âge le plus représenté est celui des 40-49 ans avec 23 % de candidatures. Au dernier scrutin, le groupe d’âge le plus représenté parmi les candidats était celui des 18-29 ans, auquel appartenaient 23 % des aspirants députés, suivi de près toutefois par le groupe des 50-59 ans.
- Le plus jeune parti, selon la moyenne d’âge des candidats, est Québec solidaire (41 ans). Le plus vieux est la CAQ avec une moyenne de 49 ans. Le PQ et le PLQ sont à peine plus jeunes, la moyenne y étant de 48 ans.
- Il s’agit d’un changement par rapport au dernier scrutin, lorsque la CAQ remportait la palme du parti le plus jeune, la moyenne d’âge de ses candidats étant alors de 44 ans. Les candidats de QS suivaient de près avec une moyenne de 45 ans. Le parti le plus vieux était le PLQ, avec une moyenne de 51 ans, suivi du PQ, où la moyenne était de 49 ans.
- 19 ans: c’est l’âge des deux candidats les plus jeunes de ces élections, qui portent tous deux les couleurs de QS.
- William Lepage, dans Blainville, et Kassandra Torok, dans Terrebonne, viennent de souffler leurs 19 bougies. Lorsqu’ils sont nés, en 1999, le premier ministre du Québec était Lucien Bouchard, du PQ.
- Québec solidaire compte aussi les deux plus vieux candidats, soit Élisabeth Germain, dans Charlesbourg, qui aura 73 ans cet automne, et André Vincent, dans Vachon, qui est âgé de 72 ans. À leur naissance, Maurice Duplessis dirigeait le Québec.
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À chaque élection, les partis tentent de séduire les familles. Ils s’y efforceront encore plus cette année, et les promesses concernant les familles sont déjà nombreuses.
L’importance des familles comme catégorie cible et comme thème de campagne n’est pas étrangère au changement générationnel qui s’opère cette année dans l’électorat. «Les partis voient les chiffres, eux aussi», dit M. Montigny.
Mais l’image de la famille reste un modèle très traditionnel, souligne Manon Tremblay, professeure titulaire à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa. «On fait un paquet de politiques publiques pour les familles traditionnelles, mais on se rend compte qu’il y a beaucoup de gens célibataires ou qui vivent seuls, et les familles monoparentales progressent rapidement.»
- Pour l’instant, le parti qui compte le plus de parents parmi ses candidats est la CAQ: 83 % d’entre eux ont des enfants.
- Le PLQ a le second pourcentage: 79 %. Au PQ, 74 % des candidats sont parents, alors que chez QS, dont les candidats sont plus jeunes, un candidat sur deux a des enfants.
- 77 candidats ont plus de trois enfants et, du nombre, 28 ont quatre enfants ou plus. Cinq d’entre eux ont cinq enfants, notamment le chef du PQ Jean-François Lisée et le libéral François Blais.
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Même si les professions des candidats sont assez variées, on remarque que certaines filières sont plus favorisées que d’autres.
- La CAQ compte le plus de candidats ayant fait des études en administration, soit 33, suivie de près par le PLQ, où ils sont 28.
- Si on s’intéresse aux 70 candidats qui occupent actuellement des postes de direction, 28 sont à la CAQ.
- On compte cinq médecins candidats, dont deux au PLQ. Tous les autres partis en comptent un.
- Le PLQ, historiquement peuplé d’avocats, compte aussi le plus grand nombre de candidats diplômés en droit, soit 15.
- QS se démarque par un grand nombre de candidats ayant fait des études en sciences humaines et sociales. C’est aussi le parti qui compte le plus de candidats ayant étudié en santé, en science politique ou en enseignement.
- On compte 52 enseignants parmi les candidats. La moitié d’entre eux portent les couleurs de QS.
- QS compte également plusieurs candidats qui travaillent dans le communautaire, soit 14 sur un total de 19 tous partis confondus.
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Qu’ont en commun Gaétan Barrette, François Legault et Dominique Anglade? Outre le fait que les trois ont déjà été réunis au sein de la CAQ, ils sont aussi propriétaires de résidences évaluées à plus de 2 millions de dollars.
- La plupart des candidats de ces élections sont propriétaires. C’est à QS, toutefois, que l’on en compte le moins, soit 55 %, alors que leur proportion est de 86 % à la CAQ.
- Le PLQ n’est pas très loin, avec 84 % de propriétaires. Au PQ, c’est 78 %.
- Ainsi le pourcentage de propriétaires est-il plus élevé dans trois des partis que dans l’ensemble de la population de la province, puisque 61,3 % des Québécois sont propriétaires.
- On constate une disparité importante entre les moyennes de la valeur immobilière (maison, chalet, condo) des candidats de chaque parti. Chez les solidaires, la moyenne des biens résidentiels est de 247 000 $ par candidat.
- À l’opposé du spectre, la valeur immobilière moyenne des candidats du PLQ est de 632 000 $. La CAQ arrive deuxième avec 579 000 $, suivie du PQ à 415 000 $.
- Dans le top-10 des candidats dont la valeur immobilière est la plus élevée, le ministre de la Santé et médecin Gaétan Barrette arrive en tête, avec des avoirs de 4,7 millions de dollars. Outre sa maison à Mont-Royal (1,96 M$), il possède deux condos et un domaine sur le bord d’un lac évalué à 2,1 millions de dollars.
- La maison la plus chère appartient au chef de la CAQ François Legault. Selon l’évaluation municipale, sa valeur est de 4,4 millions de dollars. La maison était à vendre depuis 2015, jusqu’à tout récemment, pour 4,9 millions de dollars. M. Legault avait acquis cette maison pour 1,15 million de dollars en 1998.
- Parmi les autres candidats propriétaires de maisons chères, le libéral Pierre Arcand possède une maison de 2,16 millions de dollars à Mont-Royal et la vice-première ministre sortante Dominique Anglade habite à Westmount dans une résidence évaluée à 2,15 millions.
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On compte beaucoup plus de diplômés universitaires au sein des partis politiques que dans l’ensemble de la population québécoise. Quatre-vingt-un pour cent de candidats, en moyenne, ont obtenu un diplôme universitaire, contre 31 % des Québécois.
- «Les Québécois veulent des candidats qui leur ressemblent et avec qui ils sentent une proximité, mais ils veulent aussi des gens qui vont mieux faire le travail qu’eux», fait remarquer M. Montigny.
- La CAQ est le parti qui compte le plus de diplômés universitaires, soit 86 %. Cela tranche avec l’un de ses ancêtres, l’ADQ. Au milieu des années 2000, le parti de Mario Dumont était celui qui comptait le moins d’universitaires dans ses rangs, soit 51,2 % en 2007, indique une étude de la chercheuse Magali Paquin publiée dans la revue Politique et sociétés en 2010.
- Certains seront peut-être étonnés d’apprendre que c’est au PLQ que l’on compte le moins d’universitaires pour l’instant, soit 76 %. Le PQ, à 83 %, est suivi de QS à 79 %, toujours en date du 6 août.
- Parmi les quatre partis, on compte 24 candidats qui sont encore aux études, dont 15 dans les rangs de QS.
Si vous avez des informations sur une de ces candidatures, écrivez à notre Bureau d’enquête.