
Quand on demande à Marie-Mai, Marc Dupré et Alex Nevsky de comparer La Voix Junior à La Voix «régulière», un mot ressort : légèreté. Au dire du trio de coachs, les enregistrements du nouveau concours de chant de TVA réservé aux jeunes de 7 à 14 ans sont beaucoup plus décontractés. En entrevue au Journal, Alex Nevsky parle même d’ambiance de «camp de vacances». «Le but, c’est d’avoir du gros fun, précise le chanteur. La Voix normale, c’est aussi du gros fun, mais ça vient avec beaucoup, beaucoup d’attentes, de stress et d’angoisse.»
Adaptation québécoise du format étranger The Voice Kids, La Voix Junior monopolisera les ondes — et possiblement les conversations — pendant neuf semaines cet automne. Les grands rendez-vous du dimanche seront pilotés par Charles Lafortune, tandis que Maripier Morin animera la quotidienne du lundi.
Enregistrées cet été, les rondes préliminaires ont visiblement enthousiasmé les coachs, non seulement en raison du talent des concurrents, mais du climat qui régnait sous les projecteurs des studios Mels. Une atmosphère «totalement différente» de celle dans laquelle Marie-Mai avait baigné en 2013, année où elle avait aidé à lancer le phénomène La Voix aux côtés d’Ariane Moffatt, Jean-Pierre Ferland et Marc Dupré.
«Je n’ai pas l’impression de vivre la même expérience, révèle la chanteuse. Du tout, du tout. La Voix Junior, c’est du bonheur. L’énergie des jeunes nous rentre dedans. C’est contagieux. C’est rafraîchissant. L’équipe technique, les cameramen, tout le monde a beaucoup de plaisir. Personnellement, je n’ai jamais eu autant de fun en télé.»
La pression que Marie-Mai sentait — et ressentait — auparavant est également tombée. Car prendre sous son aile un artiste qui tente de ressusciter sa carrière musicale n’est pas une mince affaire.
«Pour certains candidats, La Voix, c’est la dernière chance, rappelle Marie-Mai. Pour d’autres, c’est ce qui peut changer leur vie: c’est ce qui fait en sorte qu’ils continuent là-dedans ou qu’ils lâchent carrément. Ça peut alourdir les choses. À La Voix Junior, les participants ont juste du fun à chanter. On sent qu’ils n’ont pas nécessairement d’attentes. C’est toujours très positif: s’ils sont choisis, ils sont méga heureux et s’ils ne sont pas choisis, ce n’est pas grave parce qu’ils savent qu’ils vont revenir.»
comme des champions
Coach vainqueur de 2015 grâce à Kevin Bazinet, Marc Dupré connaît mieux La Voix que quiconque, puisque depuis les débuts du concours, il n’a raté aucune saison. Il retrouvera même son fauteuil rouge l’hiver prochain quand l’émission reviendra en ondes. Joint au téléphone, l’auteur-compositeur-interprète dit avoir retrouvé une atmosphère de fête à La Voix Junior.
«Je sens moins la compétition, autant entre les candidats qu’entre les coachs. C’est unique.»
Au départ, le père de trois enfants craignait de voir des jeunes craquer en montant sur scène. Sa peur s’est toutefois estompée après la première journée d’enregistrement.
«C’est impressionnant de voir qu’ils font ça comme des champions, parce que c’est gros: c’est le même décor, c’est rempli de monde... C’est énorme. Mais ils ont tous bien géré la situation. Ça m’a rappelé qu’à leur âge, quand j’avais envie de faire quelque chose, je plongeais sans trop me poser de questions. C’est avec les années qu’on commence à comprendre les attentes et qu’on se met une pression supplémentaire.»
Alex Nevsky, qui vivra sa première expérience comme coach après avoir rempli les fonctions de mentor au cours des deux dernières années, fait écho aux propos de Marc Dupré.
«À cet âge, même s’ils ont tous suivi La Voix normale, même s’ils savent que c’est une grosse émission, ils arrivent plus dégagés. La pression de performer est moins grande. Ils ne pensent pas nécessairement à faire carrière. Ils veulent juste s’amuser.»
« Flabergastée »
Histoire de préserver la surprise, les coachs de La Voix Junior se font avares de commentaires quand vient le temps de parler des candidats qui défileront sur scène au cours des prochaines semaines. Mais à force d’insister, quelques superlatifs finissent par émerger.
«Ils sont tellement allumés! lance Marie-Mai. Quand j’avais leur âge, je voulais être chanteuse, mais je n’avais aucune idée du style que je voulais adopter. Je n’avais pas d’identité musicale. Mais certains d’entre eux m’ont flabergastée. Ils savent exactement ce qu’ils veulent faire. Quand je vois ça, je dis: “Ayayaye! Ils sont 1000 fois plus avancés que moi à cet âge!” C’est phénoménal!»
«Les gens vont être sciés en deux», ajoute Marc Dupré, qui dit avoir vécu de «grosses émotions».
TVA présente La Voix Junior à compter du dimanche 2 octobre à 19 h 30.

Comment étaient les trois coachs de La Voix Junior quand ils avaient l’âge des participants du concours? Le Journal leur a posé la question, leur permettant momentanément de retomber en enfance...

À six ans, Marie-Mai profitait de chaque party de famille pour chanter. On peut d’ailleurs voir sa première prestation en public au début du vidéoclip de Comme avant sur YouTube. Des images tournées maison qui montrent une petite blondinette entonner Au clair de la lune assise sur les genoux de son père. «Ce n’était pas fabuleux, mais c’était cute!», rigole aujourd’hui la chanteuse.
En entrevue au Journal, Marie-Mai dit avoir fait ses classes en prenant ce genre d’initiative. «J’étais tout le temps celle qui montait sur les tables pour faire son show. Ça devait tellement être fatigant!»
À cet âge, Marie-Mai ne chantait pas seulement quand tous les regards étaient tournés vers elle. Au contraire. Elle pratiquait également seule dans sa chambre, parce que pour elle, l’objectif était clair: une carrière de chanteuse l’attendait.
Une travaillante
Marie-Mai a beau avoir commencé à écrire des chansons au primaire (sa première composition originale date de 1990), elle n’aurait pas fait long feu dans une compétition comme La Voix Junior. C’est du moins ce qu’elle croit.
«J’avais beaucoup de volonté. Je savais que c’était ce que je voulais faire dans la vie, mais j’avais beaucoup de travail devant moi. Certaines personnes naissent avec une voix phénoménale. Moi, c’était plutôt brut. Au début, quand je disais à mes amis que j’avais envie de devenir chanteuse, je suis convaincue qu’ils devaient se dire : “Mais t’es pas si bonne que ça!” Ça s’est travaillé au fil du temps…»
«J’ai passé des années à enregistrer ma voix, poursuit-elle. Je recommençais chaque fois qu’on m’entendait fausser. Je prenais des cours de chant, de piano, de théâtre… Tout ça a fini par payer. Quand on veut vraiment, il n’y a rien qu’on ne peut pas faire.»
Toujours les jeunes
Marie-Mai, qui attend son premier bébé cet automne, a toujours été proche des jeunes. Voilà pourquoi lors des enregistrements de La Voix Junior, elle n’a éprouvé aucune difficulté à tisser des liens avec les concurrents.
«Ado, on m’assoyait à la table des enfants parce que j’étais celle qui pouvait les entertainer. J’étais aussi la gardienne du quartier. Et quand j’ai commencé ma carrière, c’était encore les jeunes! Comme quoi, il y a des choses qui ne changent pas!»
Marie-Mai plaît effectivement aux jeunes depuis sa sortie de Star Académie en 2003. Ces derniers se sont arrachés tous ses albums, d’Inoxydable en 2004 au plus récent M en 2014. Ce sont également eux qui remplissent ses salles de spectacle.
Cette popularité auprès du public pré-adolescent et adolescent, l’auteure-compositrice-interprète l’avait présagé.
«J’en avais une petite idée, parce que ma musique était elle-même très jeune, souligne la chanteuse de 32 ans. Quand j’ai commencé, j’avais 18 ans. Je voulais faire des chansons que j’avais envie d’écouter. Je savais que ça n’allait pas chercher les adultes, mais je n’ai jamais visé un groupe d’âge en particulier. J’y suis toujours allée avec mes goûts personnels.»

Les enfants et Alex Nevsky, c’est une relation symbiotique. Un peu trop même. Dans les fêtes de famille, le chanteur passe tout son temps avec eux. «Les kids viennent toujours chiller avec moi, raconte l’auteur-compositeur-interprète de 30 ans. Des fois, ça devient presque un problème tellement ma blonde et moi on s’exclut du party parce qu’on tripe avec les jeunes!»
Heureusement qu’Alex Nevsky aime les enfants, parce que depuis quelques années, ces derniers composent une partie du public qui écoute ses chansons, achète ses albums et remplit ses salles de spectacle.
Tout a commencé au printemps 2013 avec la sortie d’un certain ver d’oreille intitulé On leur a fait croire. Lancée cinq mois avant la parution d’Himalaya mon amour, le second album du chanteur, trois ans après De lune à l’aube (2010), la pièce a connu un immense succès, dominant le palmarès radio du Québec durant 18 semaines.
Alex Nevsky a réalisé combien le morceau plaisait aux jeunes lors du Record Story Day, une journée consacrée aux disquaires indépendants durant laquelle il avait offert des prestations dans trois villes différentes : Sherbrooke, Saint-Hyacinthe et Montréal.
«Les kids qui étaient là tripaient vraiment, raconte le chanteur en entrevue. Ils n’arrêtaient pas de danser... Ça m’avait déboussolé, parce que j’avais vendu 7000 copies du premier album. Jusque-là, j’avais un public plutôt radio-canadien qui était fan de musique francophone… J’avais trouvé ça particulièrement étrange.»
Des ritournelles
Avec le recul, Alex Nevsky réalise qu’il aurait dû voir venir le phénomène de loin, surtout avec une chanson qui fait «pa pa pa pa pa pa». Himalaya mon amour contient également Les coloriés et Fanny, deux autres succès radio qui ont rallié les jeunes.
«Le disque est plein de ritournelles simples et joyeuses, ajoute celui qui lancera son troisième opus en novembre. Elles accrochent un sourire au visage. C’est fou le nombre de vidéo de kids qui chantent mes tounes que j’ai reçues sur Facebook!»
admiratif
Alex Nevsky voue une grande admiration aux candidats de La Voix Junior, car à leur âge, il n’aurait jamais osé participer à une compétition du genre.
«J’étais beaucoup trop gêné, explique-t-il. Je n’y serais jamais allé par moi-même. Il aurait fallu me tordre un bras, parce que quand j’étais jeune, aussitôt que les regards étaient tournés vers moi, je n’étais pas bien. Je comptais un but au soccer et j’allais voir mes amis pour leur dire bravo. J’étais hyper gêné.»
Surprise
Contrairement à plusieurs chanteurs, Alex Nevsky n’a jamais rêvé de devenir musicien. La musique est d’ailleurs entrée dans sa vie à 18 ans, quand il s’est inscrit à l’École nationale de la chanson de Granby. «Ça avait été une grosse surprise pour mes parents, indique le lauréat de plusieurs prix Félix. Ils ne m’avaient jamais entendu jouer du piano ou même chanter!»
Étonnés, ces derniers ont néanmoins encouragé leur fils à suivre ses désirs. «Ils m’ont toujours soutenu. Ce n’est pas tout le monde qui a cette chance. Ils sont même venus me voir en spectacle à Rouyn-Noranda. Mon père a déjà fait le trajet jusqu’à Rimouski… J’ai été chanceux. Je suis né dans une famille qui valorise beaucoup la musique.»

Enfant, Marc Dupré voulait devenir avocat. Pourquoi? Parce que c’était payant. Une raison qui n’a pas satisfait son père. «Il m’a dit que ce n’était pas la bonne façon de choisir un métier, qu’il valait mieux faire quelque chose qu’on aime peu importe le salaire, parce qu’au moins, le lundi matin, ça t’assure d’être heureux d’aller travailler», raconte le chanteur.
Cette réplique, Marc-Dupré s’en souvient encore, tout comme la première fois qu’il a chanté en public. C’était en camp de vacances, alors qu’il avait 10 ans, soit l’âge des participants de La Voix Junior. Il avait certes entonné quelques airs en famille avant, mais jamais devant des étrangers.
Les choses ont changé quand un moniteur a sorti sa guitare pour reprendre du Beau Dommage. Le blues d’la métropole, pour être plus précis. À cette époque, Marc Dupré ne connaissait pas beaucoup le répertoire du groupe phare des années 1970 au Québec, mais cela n’allait pas l’empêcher de briller à son tour.
«J’avais appris la toune par cœur et trois jours plus tard, j’avais chanté un peu plus fort que les autres. Les moniteurs avaient trouvé que j’avais une bonne voix et j’avais commencé à faire mon show en imitant Francis Cabrel, Julien Clerc et Pierre Lalonde.»
Tel père, telle fille
Père de trois enfants, Marc Dupré laisse souvent sa fille aînée, Stella, chanter dans ses spectacles. Âgée de 13 ans, cette dernière n’a toutefois pas exprimé le désir de participer à La Voix Junior.
«Elle m’a demandé si j’allais être coach cet été, j’ai répondu “peut-être”, et ce n’est pas allé plus loin, indique l’auteur-compositeur-interprète. Elle s’est probablement dit : «Je l’ai déjà comme coach à la maison, s’il fallait que je l’aie comme coach à la télévision…» C’est comme en sport: tu ne veux pas avoir ton père comme entraîneur au hockey!»
Chanteur populaire
Selon Marc Dupré, La Voix est – en partie – responsable du succès qu’il remporte auprès des enfants depuis quelques années. Rendez-vous familial par excellence du dimanche soir, la compétition de chant de TVA a conféré au chanteur une réputation de gars qui «fait des jokes», souligne le principal intéressé.
Autre facteur ayant contribué à gonfler sa cote de popularité auprès des jeunes : le succès radio de pièces comme Nous sommes les mêmes et S’aimer comme on est. Cette dernière a d’ailleurs été composée pour Stella.
«Je voulais lui dire : “T’es parfaite comme t’es”, explique le chanteur. Je l’ai écrite en pensant à tous ces jeunes qui se cachent derrière plein d’affaires, comme des filtres Instagram, etc. Des fois, ils s’inventent même des vies alors que leur propre vie est magnifique. En show, quand je fais S’aimer comme on est, la réponse est toujours instantanée.»
Comme un petit garçon
Marc Dupré dit avoir adoré participer aux enregistrements de La Voix Junior cet été. Entouré de jeunes, il avait l’impression d’avoir retrouvé son cœur d’enfant et d’être un petit garçon à nouveau.
«Avec les jeunes, il n’y a pas de jugement. C’est direct. Quand on est triste, on est triste, et quand on est content, on est content. Ils ne cachent pas leurs émotions. Et quand ils rient, c’est sincère.»